Assemblée Chrétienne Evangélique
Biographie de Watchman Nee
PRÉDICATEUR EVANGELISTE
Watchman (Sentinelle en français) Nee est né à Swatow, en Chine, dans la province de Fukien, en 1903.
Il se convertit en 1920 à l'âge de 17 ans. Dès le début, sa consécration au Seigneur fut entière. A 18 ans, il rencontra Mlle M. E. Barber, une missionnaire indépendante envoyée par la chappelle de Surrey, qui lui prêta de la littérature chrétienne: c'est ainsi que Nee fit connaissance avec les classiques chrétiens. Il commença à écrire la même année.
En plus de la Bible, il lisait énormément, surtout les livres des chrétiens. Il lisait Andrew Murray, Robert Govett, G. H. Pember, D. M. Panton, G. H. Lang, J. Penn-Lewis et beaucoup d'autres. Il possédait une grande collection des écrits des "Frères" (J. N. Darby, W. Kelly, C. H. Mackintosh...), mais lisait également des études bibliques, des biographies, et connaissait bien l'Histoire de l'Eglise.
Il était en communion étroite avec Théodore Austin-Sparks et les frères du Honor Oak Christian Fellowship, à Londres. Nee considérait même le frère Austin-Sparks comme son père spirituel, tant leur communion était riche et fructueuse.
Watchman Nee ne se satisfaisait pas des églises dénominationnelles qu'il rencontra en Chine, aussi entreprit-il de fonder une communauté basée sur des préceptes moins rigides. S'appuyant sur les écrits des Frères, il établit un culte le dimanche soir basé sur l'échange autour de la Table du Seigneur. Les participants y étaient libres de prier et d'offrir leurs louanges au Seigneur. Il avait le sentiment que ce type de rencontre se rapprochait bien plus de l'idéal néo-testamentaire. En 1928, il déménagea de Foochow à Shanghaï, qui allait devenir le centre de rayonnement de son ministère.
La congrégation à Shanghaï grandit, et il devint vite nécessaire de procéder à quelques changements: l'église fut divisée en 15 "familles" (groupes de maison), qui se réunissaient 3 fois par semaine, pour rompre le pain, prier et étudier la parole. Chaque famille pouvait compter jusqu'à 200 croyants et était subdivisée en sections de 15 membres environ. Le partage et la manifestation des dons spirituels y étaient encouragés.
Sous le ministère de Nee, la communauté était gérée par une multitude d'anciens et chaque "famille" était confiée aux soins d'un frère ou d'une soeur. On y trouvait même des ministères des missionnaires à plein temps - à une époque on en dénombra jusqu'à 200 - qui voyageaient à travers les contrées non évangélisées de Chine, implantaient des églises et gagnaient de nouveaux convertis.
Dans les années 1940, on comptait 470 groupes en communion avec l'église de Shanghaï. On les surnommait le "Petit Troupeau", d'après le livre du même nom qu'ils avaient emprunté aux églises de Frères.
Le "Petit Troupeau" n'était qu'un des mouvements spirituels qui existaient en Chine. On y trouvait aussi la "Famille de Jésus", le "Mouvements des Dons Spirituels" et la "Véritable Eglises de Jésus", lesquelles avaient choisi de développer plutôt les missions à l'étranger, dans leur tentative de retourner aux sources du Nouveau Testament. Selon eux, les églises dénominationnelles étaient trop occidentalisées et tendaient à diviser plutôt qu'à unir le Corps de Christ.
Le ministère de Watchman Nee dura près de 30 ans. Il fut utilisé par Dieu pour implanter et affermir des centaines d'églises, non seulement en Chine, mais également dans tout l'Extrême-Orient. Sa compréhension des vérités bibliques et ses écrits sur l'Eglise collent toujours au plus près des Ecritures. La Vie Chrétienne Normale et La Vie Normale de l'Eglise sont des livres que chaque croyant et chaque conducteur spirituel devraient lire absolument.
Il était aidé dans sa tâche par des frères de valeur comme Witness Lee, Stephen Kaung, Faithful Luke, Simon Meek, James Chen et de nombreux autres.
En 1952, il fut emprisonné par le gouvernement communiste et il resta en prison jusqu'à sa mort en 1972. Ses écrits sont encore aujourd'hui une source abondante et une nourriture pour les chrétiens du monde entier.
Témoignages personnels de Watchman Nee donnés à Kulangsu,
dans la province de Fukien, le 18 octobre 1936
Introduction
Ces trois témoignages de Frère Watchman Nee furent donnés au cours d’une réunion pour les collaborateurs, qui eut lieu en octobre 1936, à Kulongsu, une île qui se trouve au large de la côte sud-est de la province de Fu-Kien, en Chine. Pour autant que je le sache, ce fut la seule fois dans sa vie où il parla en détail de ses "affaires personnelles". Ce n’est que très rarement qu’il avait parlé, en public, de sa propre expérience spirituelle, probablement "afin que personne n’ait à mon sujet une opinion supérieure à ce qu’il voit en moi ou à ce qu’il entend de moi" (2 Corinthiens 12:6). Le témoignage de Paul, dans 2 Corinthiens, ne fut divulgué que quatorze années après les faits. Par le passé, j’ai souvent pensé à publier ces trois messages, mais, pour être en accord avec la façon de voir de Watchman Nee, j’en ai différé la publication jusqu’à ce jour, après un laps de temps de 37 ans. Je crois que le temps opportun est maintenant venu, puisqu’il est décédé le 1er juin 1972.
J’espère que le lecteur voudra bien ne pas trop s’attarder à analyser sa manière d’être mais que, plutôt, il verra comment le Seigneur a œuvré en lui. Parce qu’il était disposé à laisser le Seigneur œuvrer en lui, la gloire de ce dernier put, dès lors, être manifestée, tout comme Paul le dit dans 2 Thessaloniciens 1:12: "Ainsi le nom de notre Seigneur Jésus sera glorifié en vous, et vous serez glorifiés en lui, selon la grâce de notre Dieu et du Seigneur Jésus-Christ."
Ces trois témoignages ne sauraient en aucune façon recouvrir la totalité de sa vie et de son œuvre spirituelles avant 1936. En lisant Le Présent Témoignage, La Revue Chrétienne et les lettres ouvertes qu’il a publiées avant 1936, nous pouvons voir qu’il y a encore d’innombrables témoignages et travaux qu’il vaudrait la peine de mentionner. Dans cette réunion pour les collaborateurs, ce fut par manque de temps qu’il ne put parler davantage.
Premier témoignage
Le 18 octobre 1936
Actes 26:29; Galates 1:15
Salut et vocation: l’arrière-plan familial
Je suis né dans une famille chrétienne. J’étais le troisième enfant précédé par deux sœurs. Parce que j’avais une tante qui avait donné naissance à six filles successives, ma tante paternelle était mécontente lorsque ma mère a donné naissance à deux filles. D’après les coutumes chinoises, les garçons sont préférés aux filles. Lorsque ma mère a donné naissance à deux filles, les gens disaient qu’elle serait probablement comme ma tante, qu’elle enfanterait une demi-douzaine de filles avant de donner naissance à un garçon. Bien qu’à cette époque ma mère n’ait pas été clairement sauvée, elle savait comment prier. Ainsi elle a parlé au Seigneur, lui disant : " Si j’ai un garçon, je Te le consacrerai. " Le Seigneur a entendu sa prière et je suis né. Mon père m’a dit : " Avant ta naissance, ta mère a promis de te présenter au Seigneur. "
Salut et service
J’ai été sauvé en 1920 à l’âge de 17 ans. Avant d’être sauvé, j’expérimentais une sorte de conflit mental au sujet du fait s’il fallait ou non que j’accepte le Seigneur Jésus comme mon Sauveur et que je devienne le serviteur du Seigneur. Pour la plupart des gens, le problème au moment du salut est celui de savoir comment être délivré du péché. Pour ma part, le fait d’être délivré du péché et ma carrière étaient liés. Si je devais accepter le Seigneur Jésus comme mon Sauveur, je devais L’accepter simultanément comme mon Seigneur. Il me délivrerait non seulement du péché mais aussi du monde. A cette époque, j’étais effrayé par l’idée d’être sauvé, parce que je savais qu’une fois sauvé, je devais servir le Seigneur. Par nécessité, par conséquent, ma conversion allait être une conversion duale. Il m’était impossible de mettre de côté l’appel du Seigneur en ne désirant que le salut. Je devais choisir entre soit croire au Seigneur et avoir un salut dual, soit laisser échapper les deux. Pour moi, accepter le Seigneur signifierait que les deux événements se produiraient simultanément.
Décision définitive
Le 29 avril 1920 au soir, j’étais seul dans ma chambre. Je n’avais pas la paix dans mon esprit. Que je m’asseye ou que je m’allonge, je ne pouvais pas trouver le repos, car à l’intérieur de moi, il y avait ce problème de savoir si je devais ou non croire au Seigneur. Ma première inclinaison était de ne pas croire au Seigneur Jésus et de ne pas être chrétien. Cependant cela me mettait mal à l’aise au fond de moi. Il y avait un réel combat au dedans de moi. Alors je me suis agenouillé pour prier. Au début, je ne trouvais aucun mot à dire dans ma prière. Mais finalement beaucoup de péchés sont venus devant moi, et j’ai réalisé que j’étais pécheur. Je n’avais jamais eu une expérience semblable dans ma vie avant ce moment là. Je me suis vu moi-même comme un pécheur et j’ai aussi vu le Seigneur. J’ai vu la pourriture du péché et j’ai aussi vu l’efficacité du précieux sang du Seigneur qui me purifiait et me rendait plus blanc que la neige. J’ai vu les mains du Seigneur clouées à la croix, et au même moment, je L’ai vu étendre Ses mains vers l’avant pour m’accueillir, en disant : " Je suis ici dans l’attente de te recevoir. " Submergé par un tel amour, il n’était pas possible que je Le rejette, et j’ai décidé de L’accepter comme mon Sauveur. Auparavant, je me moquais de ceux qui croyaient au Seigneur, mais ce soir là, je ne pouvais pas rire. Au lieu de cela, j’ai pleuré et confessé mes péchés, cherchant le pardon du Seigneur. Après avoir fait ma confession, le fardeau des péchés m’était enlevé et je me suis senti flotter et plein de joie et de paix intérieures. C’était la première fois de ma vie que j’ai su que j’étais pécheur. J’ai prié pour la première fois et j’ai eu ma première expérience de paix et de joie. Il est possible qu’il y ait eu une certaine paix et une certaine joie avant, mais l’expérience vécue après mon salut a été réelle. Seul dans ma chambre ce soir-là, j’ai vu la lumière et perdu conscience de tout ce qui m’environnait. J’ai dit au Seigneur : " Seigneur, Tu as vraiment été miséricordieux à mon égard. "
Je rejette mes ambitions, si chères à mes yeux
Dans l’assistance, aujourd’hui, il y a au moins trois de mes anciens camarades de classe, dont frère Kwang Hsi Weigh, qui peuvent témoigner à la fois de ma mauvaise conduite et de mes très bonnes notes en classe. D’un côté, je transgressais souvent le règlement de l’école, alors que de l’autre côté, mon intelligence - un don de Dieu - me permettait d’être le premier à tous les examens. Mes compositions étaient souvent sélectionnées pour paraître au tableau d’affichage. Je me fiais aveuglément à mon jugement; je faisais de nombreux rêves de jeunesse et forgeais des projets de carrière. Si je travaillais suffisamment, pensais-je, je pourrais atteindre n’importe quel niveau. Après mon salut, de nombreux changements se produisirent: tous les projets que j’avais formés pendant plus de dix ans furent vidés de leur sens et mes chères ambitions mises au rancart. Dès ce moment, avec l’assurance indubitable de l’appel de Dieu, je sus quelle allait être l’orientation de ma vie. Je compris que le Seigneur m’avait attiré à lui à la fois pour mon propre salut et pour sa gloire. Il m’avait appelé à le servir et à être son collaborateur. Auparavant, j’avais méprisé les prédicateurs et les sermons, parce qu’à cette époque, la plupart des prédicateurs étaient les employés serviles de missionnaires européens ou américains, et gagnaient tout au plus huit ou neuf dollars par mois. Je n’avais jamais imaginé une seconde que je deviendrais prédicateur, une profession que je considérais comme insignifiante et méprisable.
J’apprends à servir le Seigneur
Après avoir été sauvé - alors que les autres apportaient des romans qu’ils lisaient en classe - j’apportai une Bible afin de l’étudier (1). Par la suite, je quittai l’école pour entrer à l’Institut pour l’étude de la Bible que Sœur Dora Yu, une évangéliste célèbre, avait fondé à Shanghai. Peu de temps après, cependant, elle me renvoya poliment de l’Institut avec cette explication qu’il ne serait pas opportun que j’y reste plus longtemps. Mes goûts de gourmet, ma manière désinvolte de m’habiller et les heures tardives auxquelles je me levais décidèrent Sœur Yu à me renvoyer à la maison. Mon désir de servir le Seigneur avait reçu un coup sérieux. Je pensais que ma vie avait été transformée, mais il restait, en fait, encore beaucoup de choses à changer. Comprenant que je n’étais pas prêt à servir Dieu, je décidai de retourner à l’école. Mes camarades de classe se rendirent compte que certaines choses avaient changé, mais aussi que le fond de mon ancien tempérament était toujours le même. Pour cette raison, mon témoignage à l’école n’était pas très percutant et lorsque j’essayai de témoigner à frère Weigh, il ne me prêta aucune attention.(2)
J’apprends à amener les gens à Dieu
Après que je fus devenu chrétien, j’eus spontanément le désir d’amener d’autres personnes à Christ; mais au bout d’une année passée à témoigner à mes camarades de classe, il n’y avait pas de résultat visible. Je pensai qu’avec davantage de mots et d’arguments, mon témoignage gagnerait en efficacité, mais il ne semblait cependant pas avoir d’effet sur les autres. Quelque temps après, je rencontrai une missionnaire du monde occidental, Mile Grose, qui me demanda combien de personnes avaient été sauvées par mon intermédiaire durant cette première année. Je baissai la tête et avouai humblement qu’en dépit de mes efforts pour prêcher l’Evangile à mes camarades de classe, aucun d’eux n’avait été sauvé. Elle me dit ouvertement qu’il y avait quelque chose entre le Seigneur et moi qui entravait mon efficacité. Peut-être était-ce un péché caché, ou des dettes, ou quelque question similaire. J’admis que de telles choses existaient. Elle me demanda si j’étais disposé à les régler sur-le-champ. J’acquiesçai. Elle me demanda alors comment je rendais témoignage, et je lui dis que je choisissais des gens au hasard et que je leur parlais du Seigneur sans me soucier de savoir s’ils manifestaient un quelconque intérêt. A cela, elle répliqua que je devrais plutôt faire une liste, et commencer par prier pour mes amis, puis qu’il fallait attendre que Dieu me donne une occasion de leur parler.
Je commençai immédiatement à mettre en ordre les questions qui entravaient mon efficacité, et dressai aussi une liste de soixante-dix amis pour lesquels je prierais chaque jour. Certains jours, il m’arrivait de prier pour eux à chaque heure, même en classe. Lorsque l’occasion se présentait, j’essayais de les persuader de croire au Seigneur Jésus. Mes camarades disaient souvent en plaisantant: "Monsieur le prédicateur arrive, écoutons son sermon!", bien qu’en fait, ils n’eussent aucune intention de m’écouter. Je rapportai mon échec à Sœur Grose, et elle me persuada de continuer à prier, jusqu’au moment où quelques-uns furent sauvés. Avec la grâce de Dieu, je continuai à prier chaque jour et, après plusieurs mois, tous les soixante-dix, sauf un, furent sauvés.
Je cherche à être rempli du Saint-Esprit
Quoique quelques-uns eussent été sauvés, je n’étais pas satisfait, vu que beaucoup, tant à l’école que dans la ville, n’étaient pas touchés par l’Evangile. Aussi, je ressentis le besoin d’être rempli du Saint-Esprit et de recevoir la puissance d’en haut.
J’allai voir Sœur M. E. Barber, une missionnaire britannique et, comme je manquais beaucoup de maturité spirituelle, je lui demandai s’il était nécessaire d’être rempli du Saint-Esprit pour recevoir sa puissance. Elle répondit: "Oui, tu dois te donner à Dieu, afin qu’il puisse te remplir de lui-même." Je répondis que j’avais déjà donné ma vie à Dieu et que j’étais sûr de son salut et de son appel, mais que je ressentais un manque de puissance spirituelle. Elle me raconta alors l’histoire suivante: "Frère Prigin était un Américain qui avait précédemment été en Chine. Il étudiait pour obtenir un doctorat en philosophie, lorsqu’il sentit que la condition de sa vie spirituelle n’était pas satisfaisante. Il dit à Dieu qu’il avait des périodes de manque de foi, des péchés qu’il ne pouvait surmonter, et peu de force pour son travail. Il pria ainsi pendant deux semaines, demandant à Dieu de le remplir du Saint-Esprit de façon à mener une vie victorieuse. Il sentit que Dieu lui disait: "Tiens-tu vraiment à cette vie victorieuse? Dans ce cas, ne présente pas ta thèse de doctorat dans deux mois, car je n’ai pas besoin d’un docteur en philosophie." Il se trouva pris dans un dilemme, car le doctorat en philosophie lui était acquis, et il était perplexe, se demandant pourquoi Dieu lui demandait d’abandonner. Le conflit dura deux mois, et bien qu’il ait eu l’ambition, depuis trente ans, d’étudier en vue d’obtenir ce titre, il écrivit finalement au rectorat de l’université pour notifier qu’il ne présenterait pas sa thèse le lundi suivant. Il était si fatigué cette nuit-là qu’il ne put trouver aucun message pour le jour d’après; aussi raconta-t-il simplement à l’assemblée l’histoire de sa capitulation devant le Seigneur. Ce jour-là, les trois quarts de l’assemblée connurent un réveil et lui-même fut fort encouragé, disant que s’il avait su quel aurait été le résultat, il se serait soumis à Dieu bien plus tôt. C’était un homme qui, par la suite, fut grandement utilisé par le Seigneur.
Pendant que je me trouvais en Angleterre, j'avais l’intention de me rendre aux Etats-Unis pour rencontrer cet homme, mais je n’en eus pas l’occasion avant sa mort. Lorsque j’entendis ce témoignage pour la première fois, je dis au Seigneur: "Je veux enlever tout ce qui me sépare de Dieu, afin d’être rempli du Saint-Esprit." Entre 1920 et 1922, je confessai mes péchés devant au moins trois cents personnes, mais je sentais qu’il y avait encore quelque chose qui me séparait de Dieu et, en dépit de mes efforts répétés, je ne gagnai ni en force ni en efficacité.
Test sévère
Je me rappelle qu’un jour, en cherchant un thème pour un message, j'ouvris ma Bible au hasard et tombai sur le passage suivant: "Quel autre ai-je au ciel que toi? Et sur la terre je ne prends plaisir qu’en toi." Je me dis: "l’auteur du Psaume 73 peut parler ainsi, mais moi, j’en suis bien incapable." La raison provenait de mes liens avec la jeune femme qui. plus tard, devait devenir mon épouse. Je lui parlais du Seigneur, mais elle ne faisait que rire. C’était la seule réponse que je recevais. C’était il y a dix ans, et je dois reconnaître que je l’aimais, quoiqu’elle ne fût pas chrétienne. Comme de nombreux jeunes gens aujourd’hui, je faisais l’expérience de liens du cœur si forts qu’ils rivalisaient avec mon obéissance au Seigneur qui voulait obtenir une place dans ma vie. Je demandai au Seigneur de remettre cette affaire à plus tard. A cette époque, je projetais d’aller annoncer l’Evangile dans cette région désolée qu’est le Tibet, de l’autre côté de la frontière, et je suggérai à Dieu de nombreuses entreprises, espérant qu’il ne soulèverait pas la question de l’abandon de celle que j’aimais. Mais une fois que Dieu eut mis le doigt sur cette affaire, il ne s’en détourna plus, et je constatai que la prière et l’étude ne servaient pas à grand-chose. Le Seigneur voulait que je renonce à moi-même et que je l’aime de tout mon cœur. Je retournai à l’école pour chercher à être rempli du Saint-Esprit et à aimer Christ, mais je dus reconnaître que je ne pouvais toujours pas prononcer avec conviction les paroles du Psaume. Le 13 février 1922, finalement, je fus disposé à mettre fin à ces liens, et j’éprouvai une grande joie. Le jour de ma conversion, je m’étais débarrassé du fardeau de mes péchés, mais ce n’est qu’en cette seconde occasion que mon cœur fut vidé de tout ce qui pouvait me séparer de Dieu. Dès lors, les gens commencèrent à être sauvés. Ce jour-là, je changeai mes vêtements élégants pour un vêtement plus simple, j’allai à la cuisine, préparai de la colle et, un paquet d’affiches d’évangélisation sous le bras, je sortis dans la rue pour les coller sur des murs et pour distribuer des tracts sur l’Evangile. A l’époque, faire cela à Fu-chou, dans la province de Fu-kien, était un acte de pionnier. A partir du second trimestre de 1922, je priai tous les jours pour mes camarades de classe dont les noms étaient inscrits dans mon carnet, et beaucoup furent sauvés. L’année suivante, il nous fallut emprunter ou louer des locaux pour nos réunions, et plusieurs centaines de personnes furent sauvées, y compris ceux dont les noms figuraient dans mon carnet, sauf un. De telles choses prouvent que Dieu nous écoute lorsque nous prions pour que des pécheurs soient sauvés.
J’apprends à me soumettre
A l’époque, notre groupe comprenait sept collaborateurs. Nous avions une réunion tous les vendredis, mais je passais la plupart du temps à discuter avec l’autre conducteur du groupe. Etant jeunes, nous étions fiers de nos propres idées et prompts à critiquer les opinions des autres. Il m’arrivait parfois de me mettre en colère et il m’était difficile d’admettre que j’avais tort. Chaque samedi, j’allais rendre visite à Sœur Barber et je me plaignais de l’attitude de l’autre conducteur, lui demandant d’intervenir et de corriger ses erreurs. Elle me réprimanda parce qu’il était de cinq ans mon aîné: "L’Ecriture, me fit-elle remarquer, dit que le plus jeune doit obéir au plus âgé." Je répondis: "Je ne peux faire cela; un chrétien se doit d’agir de façon raisonnable." Quelquefois, je pleurais le soir, après une dispute le vendredi après-midi. Je retournais la voir, le jour suivant, pour lui faire état de mes griefs et dans l’espoir qu’elle me justifierait, mais je pleurais à nouveau en rentrant à la maison le samedi. J’eus souhaité être né quelques années plus tôt. Lors d’un différend, j’avais de bonnes raisons de croire en la pertinence de mes arguments, et je pensais que, si je lui faisais remarquer comment mon collaborateur s’était trompé, je gagnerais certainement. Elle dit: "Que ton collaborateur ait tort ou non est une tout autre question. Maintenant que tu accuses ton frère devant moi, je dois te demander: Es-tu celui qui porte la croix, ou l’agneau?" J’étais honteux d’être interrogé de la sorte, et je ne l’oublierai jamais. Avec mes paroles et mon attitude, ce jour-là, je n’étais sûrement ni une personne qui porte sa croix ni un agneau. De cette manière, j’appris à me soumettre à mon collaborateur plus âgé. Je dirais que, pendant ces dix-huit mois, j’appris la leçon la plus précieuse de ma vie. Ma tête était remplie de caprices, mais Dieu voulait me faire entrer dans la réalité spirituelle. Je réalisai ce que signifie porter sa croix: Aujourd’hui, en 1936, j’ai plus de cinquante collaborateurs. Si je n’avais pas, pendant ce temps, appris la leçon de la soumission, je crains qu’il ne m’ait été impossible de travailler avec qui que ce soit. C’est Dieu qui me mit dans de telles circonstances, de manière à ce que je sois sous la limitation du Saint-Esprit. Pendant dix-huit mois, je n’eus pas l’occasion d’émettre mes propositions, et je ne pouvais que pleurer et souffrir cruellement. Si je n’étais pas passé par de telles circonstances, je n’aurais jamais compris combien j’étais difficile à traiter. Dieu enlevait les angles aigus de ma personnalité, de sorte que je peux dire aujourd’hui à des collaborateurs plus jeunes que la caractéristique par excellence du service de Dieu est un esprit de douceur, d’humilité et de paix. L’ambition, le dessein et le talent n’ont que peu de valeur si l’on ne porte pas la croix de Christ. Je suis passé par là, de sorte que je ne peux que confesser mes erreurs. Tout ce qui m’appartient est entre les mains de Dieu. La question n’est pas de savoir si une chose est juste ou fausse, mais si l’on est comme le porteur de la croix ou non. Dans l’Eglise, il n’y a pas de place pour le juste ou le faux; la seule chose qui compte est le fait de porter la croix et d’accepter qu’elle nous brise. C’est cela qui entraînera l’abondance de la vie de Dieu et l’accomplissement de sa volonté. Durant cette période de dix-huit mois, j’appris, par cette expérience continue, à me soumettre à mon frère plus âgé. Ma tête fourmillait d’idées, mais je réalisai, en définitive, que ce n’était pas là la manière de porter la croix ou d’être semblable à l’Agneau de Dieu. Aujourd’hui, en 1936, nous avons plus de cinquante collaborateurs, et mon aptitude à travailler côte à côte avec eux est due, dans une large mesure, aux expériences de ces premières années.
LA LECON DE LA CROIX ET LE COMMENCEMENT DU REVEIL
Deuxième témoignage
La leçon de la croix
Il se peut qu’un croyant soit en mesure de lire la doctrine concernant la croix, de l’étudier ou de l’expliquer, mais il ne reçoit pas nécessairement la leçon de la croix et ne connaît pas réellement la croix proprement dite pour autant. Tandis qu’en vue du service, je passais par le traitement de mon tempérament en compagnie de mes collaborateurs, le Seigneur ordonna de nombreuses croix pour moi. Je trouvai qu’il était difficile d’obéir; cependant, je savais intérieurement que si la croix m’était ordonnée par le Seigneur, il convenait d’obéir et de l’accepter, quelle qu’en soit la difficulté. Alors qu’il était sur terre, le Seigneur apprit l’obéissance par les choses qu’il souffrit (Hébreux 5:8; Philippiens 2:8). Comment pouvais-je faire exception? Lorsque je commençai à apprendre à recevoir la leçon de la croix, je n’obéis pas pendant les huit ou neuf premiers mois, bien que j’aie su qu’il était de mon devoir de me soumettre à la croix qui m’était ordonnée par le Seigneur. Enfin, je me décidai à obéir, mais cette décision ne dura guère; lorsque survenait une situation réclamant mon obéissance, j'avais des difficultés à me soumettre et j’étais rempli de pensées rebelles qui me mettaient très mal à l’aise. Depuis, j’ai dû reconnaître que la croix que le Seigneur avait ordonnée pour moi fut véritablement profitable. Cinq de mes collaborateurs avaient été mes camarades de classe depuis l’enfance, tandis que l’un d’eux, celui qui avait cinq ans de plus que moi, venait d’une autre région. Les cinq étaient toujours de son côté, contre moi; en tout cas, ils me condamnaient invariablement, disant que j’avais tort. Beaucoup de choses que j’avais accomplies leur étaient attribuées. Quelquefois, lorsqu’ils rejetaient mes opinions, je grimpais sur une colline toute proche pour pleurer devant Dieu. Pour la première fois, j’expérimentai ce que signifie "la communion de ses souffrances" (Philippiens 3:10), car si je ne pouvais avoir de la communion avec le monde, je pouvais jouir de la communion céleste.
Deux années après mon salut, je ne savais toujours pas ce qu’était la croix, et je commençai alors à en apprendre la leçon. A l’école en général, et dans ma classe en particulier, j’étais toujours classé premier. Je voulais aussi être le premier dans les affaires ayant trait au service de Dieu et, par conséquent, lorsque j’étais classé second, je désobéissais. Tous les jours, je disais à Dieu que c’en était trop pour moi, que je recevais trop peu d’honneur et d’autorité, et que tous étaient du côté de ce collaborateur plus âgé. Aujourd’hui, je peux remercier Dieu du fond du cœur et l’adorer pour tout ce qui est arrivé, car cela fut pour moi le meilleur des apprentissages. Dieu me fit rencontrer beaucoup de difficultés parce qu’il voulait que j’apprenne à obéir; et ainsi, je lui dis que j’acceptais de n’être que le deuxième. Une fois disposé à céder, je connus une joie qui était différente de celle que j ‘avais connue lors de mon salut, en ce sens que c’était une joie plutôt profonde qu’étendue. A maintes reprises, durant les huit ou neuf mois qui suivirent, je fus disposé à être brisé et à renoncer aux choses que je voulais faire, de sorte que je fus rempli de joie et de paix sur mon chemin spirituel. Le Seigneur s’était soumis à la main de Dieu, et j’étais désireux de faire la même chose. Le Seigneur, existant en forme de Dieu, n’avait point regardé comme une proie à arracher d’être l’égal de Dieu (Philippiens 2:6). Comment avais-je pu oser me placer au-dessus de notre Seigneur? Lorsque je commençai à apprendre l’obéissance, cela fut difficile au début mais par la suite, je trouvai cela de plus en plus facile, de sorte que je pus dire plus tard à Dieu que je choisissais la croix, que j’acceptais son œuvre de brisement et mettais de côté mes propres idées.
Dieu me guide dans mon travail
Lorsque l’œuvre de Dieu commença en divers endroits de Chine, en 1921, certaines vérités n’avaient pas été discernées de façon claire: la grâce et la loi, par exemple, n’étaient pas clairement définies, pas plus que n’étaient clairement différenciés le royaume des cieux et la vie éternelle, la grâce et la récompense, le salut et la victoire. La compréhension des vérités dans le Seigneur n’était ni suffisamment profonde ni suffisamment riche. Toutefois, l’Evangile de la grâce était relativement bien compris et il était annoncé clairement à l’époque où M. Wang Ming Tao se trouvait à Tehchow, les sœurs Peari Wang et Ruth Lee à Nankin, et quelques autres collaborateurs et moi-même à Fu-chou.
Vers la fin de 1922, alors que des personnes avaient déjà été sauvées à Fu-chou et que leur nombre s’accroissait, je sentis la nécessité de publier une revue. A l’époque, j’étais sans ressources. Après avoir prié pendant une semaine, deux semaines, puis pendant plus d’un mois, nous étions toujours sans le sou. Un matin, je me levai et dis: "Il n’est pas nécessaire de prier davantage; c’est un manque de foi. Ce que nous devrions faire maintenant, c’est commencer à écrire. Est-ce que Dieu va mettre d’abord l’argent entre nos mains, puis attendre que nous écrivions? A partir de maintenant, je ne prierai plus pour l’argent, mais je me mettrai à rédiger les premiers feuillets."
Lorsque le dernier mot fut copié et que tout fut prêt, je dis: "L’argent va venir!" Enfin, je m’agenouillai pour prier à nouveau et dis à Dieu: "O Dieu, les épreuves sont prêtes pour l’impression, mais il n’y a toujours pas d’argent." Après avoir prié, j’étais absolument sûr que Dieu nous fournirait l’argent; aussi nous commençâmes à le louer. C’était merveilleux. Dès que nous nous relevâmes, quelqu’un frappa à la porte. Je pensai que ce devait être quelqu’un qui apportait de l’argent. Je fus surpris de voir que le visiteur était une sœur aisée mais avare, et pensai qu’avec elle il n’y aurait pas d’argent. Mais elle me dit: "Je suis venue pour discuter avec toi d’une question extrêmement importante." Je répondis: "Je t’écoute." Elle demanda:
"Combien un chrétien devrait-il donner?" Je lui dis que nous ne devrions pas adopter la méthode de l’Ancien Testament, savoir de donner la dîme, mais que nous devrions suivre ce qui est dit dans 2 Corinthiens 9:7, que chaque personne doit donner selon l’ordre de Dieu; elle peut donner une moitié, un tiers, un dixième ou un vingtième. Elle demanda où le don devait être remis, et je répondis: "Ne donne pas à une Eglise qui s’oppose au Seigneur, ni à ceux qui ne croient pas à la Bible, pas plus qu’à ceux qui ne croient pas à la rédemption par le sang de notre Seigneur. Si personne ne les aide, ils ne pourront pas continuer à prêcher. Prie avant de donner, que ce soit aux pauvres ou pour quelque cause qui en vaille la peine, mais ne donne jamais à une organisation qui ne soit pas appropriée." Elle dit: "Le Seigneur me dit depuis quelque temps: tu es trop attachée à l’argent. De prime abord, je ne pouvais m’y résigner, mais maintenant je le puis. Lorsque j’étais en train de prier, ce matin, le Seigneur m’a dit: Tu n’as pas besoin de prier. Il faut que tu commences par donner ton argent. J’étais plutôt gênée, mais je te remets ici 30 dollars, à utiliser pour l’œuvre du Seigneur." Cette somme était juste suffisante pour imprimer 1400 exemplaires de la revue Le Présent Témoignage. Par la suite, quelqu’un nous donna 30 dollars, ce qui nous permit de couvrir le port et les autres frais. C’est ainsi que fut publié le premier numéro du Présent Témoignage.
Le commencement d’un réveil
Au début de 1923, nous commençâmes à tenir les réunions dans un bâtiment appartenant à l’un des frères de Fu-chou. Les chaises étaient empruntées à différents endroits, selon les besoins, et nous allions dans le voisinage, invitant les gens à venir écouter. Notre méthode pour inviter les gens était plutôt efficace: chaque frère portait une sorte de chasuble avec des inscriptions telles que "Tu mourras" et "Jésus sauve" devant et derrière. Bannières en mains et en chantant des cantiques, nous faisions un cortège dans les rues. Les spectateurs étaient étonnés. C’était la façon dont nous attirions beaucoup de gens à nos réunions. Nous marchions tous les jours de la même façon, et tous les jours des gens venaient écouter l’Evangile. Ils remplissaient la salle, la cuisine et même l’aire autour du bâtiment. Comme le Seigneur avait déjà commencé à œuvrer en ce lieu, beaucoup de personnes furent sauvées.
Nous avions loué un certain nombre de chaises pour nos réunions, mais au bout de deux semaines, nous n’avions plus d’argent. Il fallait retourner les chaises aux propriétaires. Fallait-il interrompre les réunions? J’annonçai que celui qui désirait assister à la réunion devait, à l’avenir, apporter sa propre chaise. Cet après-midi-là, toute la colline, la colline de Tsang Chien, fut le théâtre d’un curieux manège: jeunes et vieux, garçons et filles, portaient des chaises. Les policiers étaient fort étonnés en voyant cela.
Grâces soient rendues à Dieu! Plusieurs centaines de personnes furent sauvées. A cette occasion, le fondement du salut fut clairement posé. Jusqu’alors, beaucoup de croyants, en Chine, n’avaient pas une idée claire de ce qu’est le salut. Ce fut grâce à ces réunions et à la prédication de nos frères en divers lieux que beaucoup, depuis, comprirent ce qu’il est réellement.
Nous commençons à louer des locaux pour les réunions
Environ un mois après que nous eûmes commencé nos réunions, un certain nombre d’entre nous furent d’avis que nous devrions avoir un endroit approprié pour nos réunions. Comme nous manquions d’argent, louer des locaux était une chose au-dessus de nos moyens. Toutefois, une famille du nom de Ho, dont tous les membres étaient sauvés, me fit savoir qu’elle était disposée à nous louer des locaux, moyennant un loyer mensuel de 9 dollars seulement. Je revins voir les frères et priai avec plusieurs d’entre eux pour demander à Dieu de nous envoyer de l’argent, étant donné qu’il nous fallait payer à l’avance les trois premiers mois, lors de l’emménagement.
Chaque samedi, je me rendais à Ma Kiang, Fuchou, pour avoir de la communion avec Sœur Barber, une missionnaire qui venait d’Angleterre. Lorsque je la vis, cette fois, elle me dit: "Voici 27 dollars qu’un ami m’a demandé de te remettre pour ton œuvre." Comme le loyer était de 9 dollars par mois, soit 27 dollars pour trois mois, cette somme était exactement ce qu’il fallait, ni trop, ni trop peu. A mon retour, je payai sans hésiter les trois mois de loyer d’avance. Par la suite, nous priâmes inlassablement et le Seigneur pourvut à nos besoins. Tels furent les débuts de notre travail à Fu-chou.
Le réveil de nombreux croyants
Je n’ai jamais vu un réveil aussi grand que celui-là. En ce temps-là, des personnes étaient sauvées tous les jours. C’était comme si toute personne qui nous contactait était aussitôt sauvée. J’étudiais à cette époque au Trinity College de Fu-chou. Lorsque j’arrivais à l’école, chaque matin à cinq heures, je voyais partout des gens qui lisaient la Bible - plus d’une centaine. Il avait été très en vogue de lire des romans, mais à présent, ceux qui voulaient le faire ne le pouvaient plus qu’en cachette. En revanche, lire la Bible devenait une chose très populaire et très honorable. Il y avait huit classes dans notre école, chacune ayant un surveillant et son adjoint. Chose étonnante, le surveillant de presque chaque classe avait été sauvé. Même les athlètes les plus célèbres avaient tous été sauvés; parmi eux se trouvait frère Kwang Hsi Weigh, qui fut, pendant de nombreuses années, le champion de tennis de la province de Fukien. Plus de soixante personnes marchaient chaque jour en procession dans les rues, portant des bannières, et quelques douzaines allaient chaque jour dans les alentours distribuer des tracts. Toute la ville de Fu-chou - environ cent mille habitants - était secouée. Sous la direction du Saint-Esprit, nous commençâmes alors à avoir des réunions; et, comme de plus en plus de personnes étaient sauvées, notre œuvre s’étendait aux villages avoisinants.
Un nouveau commencement
Entre 1921 et 1923, il y avait des réunions de réveil en différents endroits, et beaucoup pensaient que, puisque ces réunions amenaient des gens au Seigneur, elles devaient être considérées comme les seules nécessaires. Mais Dieu m’amena à voir que son dessein requiert des chrétiens qu’ils se tiennent sur le terrain de l’unité dans des Eglises locales, pour représenter l’Eglise de Dieu sur terre et maintenir le témoignage de Dieu ici-bas. Cependant, certains collaborateurs avaient des points de vue différents quant à la vérité concernant l’Eglise. Lorsque j’étudiai les Actes des Apôtres, je vis que le désir de Dieu est d’établir des églises locales dans chaque ville. C’était comme si une lumière brillait soudain sur moi, et je compris son dessein. Avec cette révélation surgit un problème, du fait que quelques collaborateurs qui n’avaient pas vu cette lumière avaient des opinions différentes concernant des points importants de notre travail; ceci entraîna des frictions parmi nous. Ils pensaient que nous devions être enthousiastes dans notre œuvre de réveil et d’évangélisation, et qu’au moins, l’on pouvait voir clairement les résultats d’un tel travail, alors que je sentais fortement qu’il fallait établir des églises locales, en insistant moins sur l’autre travail. Lorsque le frère plus âgé partait organiser ailleurs des réunions d’évangélisation, je pensais secrètement organiser d’autres réunions de réveil et d’évangélisation indépendamment de lui.
Lorsqu’il était absent, j’agissais immédiatement conformément à la vision que j’avais reçue. A son retour, il s’empressait d’annuler ce que j’avais fait et agissait comme il le pensait. Mais lorsqu’il s’absentait de nouveau, je revenais à ma première idée. En conséquence, il y avait tout le temps entre nous des changements et des retours en arrière. Comme la lumière que chacun de nous avait reçue concernant notre travail était différente, telles devinrent également nos manières de travailler. L’une était d’organiser des réunions de réveil et d’évangélisation, l’autre, d’établir des églises locales. Ce que le Seigneur m’avait révélé était extrêmement clair: avant peu, il susciterait des Eglises locales en différentes parties de Chine. Chaque fois que je fermais les yeux, la vision de la naissance d’Eglises locales apparaissait devant mes yeux intérieurs (1).
En 1924, quelques collaborateurs n’étaient pas satisfaits de moi, et Dieu permit que l’Eglise à Fuchou fût mise soudainement à l’épreuve. Afin de prévenir une scission, je quittai alors Fu-chou. Puis vint une invitation en provenance des îles de la mer du Sud; je m’y rendis et des réunions débutèrent là aussi. En mai 1925, je rentrai et louai des locaux à Pagoda, dans la province de Fu-chou, un petit village près de la mer, dans le but de m’y installer. Je sentis alors que nous devions publier une revue qui insiste sur les vérités concernant le salut et l’Eglise, abordant aussi ce qui a trait aux prophéties et aux préfigurations. Mon intention première était que cette revue, intitulée La Revue Chrétienne, n’eût qu’un caractère temporaire.
En 1925, deux numéros furent publiés, en 1926, dix et, en raison d’une demande continuelle, douze en 1927. Durant les six premiers mois de 1926, je me rendis à Amoy, Kulongsu, Ch’ang-chou et Tungan pour y rendre témoignage, et beaucoup de personnes furent sauvées. Dans la seconde moitié de l’année, j’y retournai. Cette fois, je me sentais très fatigué, devant à la fois organiser des réunions, écrire des articles et m’occuper en outre de la correspondance. J’étais déjà légèrement souffrant. A l’origine, il était prévu que je préside des réunions pendant dix jours, mais le neuvième jour, je tombai malade. Un autre collaborateur vint poursuivre pendant plusieurs jours la tâche entreprise. Ce fut au cours de ces six derniers mois de 1926 que l’œuvre commença dans le sud de Fu-kien, avec des réunions à Amoy, Tungan et dans les régions environnantes.
Plusieurs médecins me dirent que la maladie que j’avais contractée pendant que j’étais à Amoy était probablement fatale, et que je ne pouvais plus guère espérer vivre que quelques mois! Je n’avais pas peur de la mort, mais je ne pouvais m’empêcher de penser à ce que le Seigneur m’avait enseigné les années précédentes, et aux leçons que j’avais apprises: rien de cela n’avait encore été mis par écrit. Assurément, tout cela ne devait pas disparaître avec moi dans la tombe! Je me préparai à écrire L’homme spirituel.
Lorsque j’arrivai à Nankin, j’appris qu’un certain nombre de frères et sœurs, qui se tenaient sur le terrain de l’unité dans l’Eglise locale, s’assemblaient pour rompre le pain; aussi j’allai naturellement les trouver et me joignis à eux pour nous souvenir du Seigneur: Frère Kwang Hsi Weigh, l’un de mes camarades de classe, faisait alors ses études à l’université de Nankin. Introduit par lui, j’allai à l’université pour donner plusieurs messages, gagnant en même temps deux frères qui se joignirent à nous pour la table du Seigneur. Tel fut le début de notre travail à Nankin.
Je viens à Shanghai
Pour pouvoir me consacrer entièrement à la rédaction de L’homme spirituel, je ne tardai pas à quitter Nankin, et j’allai à la campagne, à Wu-hsi, où j’écrivis les quatre premières parties. On se battait dans Nankin, en mars 1927, et, comme il était impossible de communiquer avec les frères et sœurs de certaines localités, je quittai la campagne pour me rendre à Shanghai. En arrivant, j’appris que de nombreux frères et sœurs étaient arrivés, les uns après les autres, de différents endroits. Avant mon arrivée à Shanghai, il y avait eu des réunions dans la maison de Sœur Pearl Wang, au jardin de Hsin, où l’on rompait le pain. Lorsque nous fûmes tous arrivés, notre lieu de réunion fut transféré à la ruelle Keng Ching. Ce furent les débuts à Shanghai du Gospel Book Room.
Vers la fin de 1927, nous avions chaque jour une réunion de prière. Les croyants de Ha-êrh-pin et des environs, au nord du fleuve Yang-tsé kiang, qui avaient été aidés par nos écrits, commencèrent à nous écrire. Réalisant qu’ils étaient prêts à recevoir un enseignement, et que les croyants en Chine en éprouvaient le besoin, nous envisageâmes d’organiser une réunion spéciale pour eux. En janvier 1928, nous louâmes des locaux dans la ruelle Wen Teh, rue Hardoon, à Shanghai, et le 1er février, nous commençâmes la réunion spéciale. Le thème central des messages était uniquement le dessein éternel de Dieu et la victoire de Christ. Nous n’abordâmes pas d’autre question comme la vérité concernant l’Eglise. Il y avait vingt ou trente frères et sœurs venus d’autres endroits; Dieu les éclaira et leur permit de voir comment ils devaient marcher en suivant le chemin de la vie. Ils résolurent pour eux-mêmes des problèmes tels que le baptême, l’abandon des dénominations, et d’autres choses similaires. Dans les quatre années qui précédèrent 1936, sept ou huit cents frères et sœurs furent sauvés ou réveillés dans quelque dix lieux de réunions au nord du fleuve Yang-tsé kiang. Dans un nombre presque identique de lieux de réunions, à Ha-êrhpin, Taishun et leurs environs, quelque quatre mille frères et sœurs furent eux aussi sauvés ou réveillés. Toute cette œuvre fut accomplie par le Seigneur lui-même, et il avait travaillé pendant des années pour qu’elle puisse avoir lieu.
Après notre déménagement à la ruelle Wen Teh en 1928, il fut décidé que nous continuerions à publier Le Présent Témoignage, étant donné que La Revue Chrétienne avait cessé de paraître. En 1930 était publié le recueil Notes sur L ‘Etude de la Bible.
Durant ces quelques années à Shanghai, notre but était d’amener les gens à suivre le Seigneur lui-même, l’enseignement des Ecritures et la conduite du Saint-Esprit. Nous n’avons jamais escompté que qui que ce soit se donne à nous, et nous ne devrions jamais l’escompter. Il ne saurait s’agir de la prétendue politique d’exclusion; de même, nous ne prétendons pas être les seuls à avoir raison; notre seul désir est d’être fidèle jusqu’à la fin. J’écrivis L’homme spirituel alors que j’étais malade. Lorsqu’il fut terminé, mon état de santé s’aggrava et je fus contraint de rester alité pratiquement tout le temps. Etant donné que la demeure terrestre de mon tabernacle était sur le point de tomber à tout moment, rien ne fut accompli, durant mes quelques premières années à Shanghai, qui vaille la peine d’être mentionné. C’est au cours des deux années suivantes que les choses commencèrent réellement. En 1931, il y eut une nouvelle réunion spéciale, dont le message principal porta sur deux thèmes cruciaux: le Nouveau Testament et la sagesse de Dieu. A cette réunion, il y avait davantage de frères et sœurs d’autres localités.
Dieu me guérit
Au début de ma maladie, en 1924, j’avais seulement un peu de fièvre, je me sentais faible, et j’avais une légère douleur dans la poitrine. Je ne savais pas ce que j’avais. Le Dr. H. S. Wong me dit: "Je sais que vous avez la foi que Dieu peut vous guérir, mais voulez-vous me permettre de vous examiner, afin que je fasse un diagnostic?" Après m’avoir examiné, il parla à Frère Wang Teng Ming, à voix basse, pendant quelque temps. Lorsque je leur demandai le résultat de l’examen, ils ne me dirent d’abord rien. Je leur dis alors que je n’avais pas peur. Le Dr. Wong me dit que l’état de ma tuberculose était si sérieux qu’un repos prolongé était nécessaire. Je ne pus dormir cette nuit-là; je sentais que je ne pouvais me présenter devant le Seigneur, si je devais aller à lui, sans avoir achevé mon travail. J’étais très déprimé. Je décidai d’aller à la campagne pour me reposer et pour avoir davantage de communion avec le Seigneur. Je lui demandai: "Quelle est ta volonté pour moi? Si je dois donner ma vie pour toi, je n’ai pas peur de la mort." Pendant six mois environ, je ne pus voir la volonté du Seigneur, mais il y avait de la joie dans mon cœur, et je savais que le Seigneur ne pouvait jamais se tromper. A cette époque, aucune des nombreuses lettres qui me parvinrent de différents lieux ne contenait d’exhortation ou de mot de consolation, mais des reproches pour m’être surmené sans avoir pris suffisamment soin de ma vie. Un frère me fit des reproches en citant Ephésiens 5:29.
Peu après, Frère Chen Chi Kwei, de Nankin, m’écrivit pour m’inviter à aller me reposer chez lui et à l’aider, en même temps, à traduire le programme d’études de l’Institut Biblique par correspondance du Dr. C.I. Scofield. A cette époque, une trentaine de frères et sœurs vinrent me voir pour avoir de la communion avec moi, et je leur parlai du problème de l’Eglise. Je réalisai que la main de Dieu était alors sur moi dans le but bien précis de me ramener à la toute première vision que j’avais eue, sans quoi je n’aurais été qu’un simple prédicateur de réveil.
Les jours passaient sans que ma tuberculose ne guérisse. J’étais allé voir un médecin allemand bien connu qui avait fait une radiographie de ma poitrine. Par la suite, lorsque je lui demandai d’en refaire une autre, il me dit que ce n’était pas nécessaire. Il me montra la radiographie d’une autre personne, et dit: "L’état de cette personne était meilleur que le vôtre; néanmoins elle est morte deux semaines après que cette radiographie eut été prise. Ne revenez plus me voir; je ne veux pas faire d’argent avec vous." Je retournai à la maison, très déçu. Je pouvais, il est vrai, m’efforcer d’écrire et d’étudier la Bible, mais je trouvais cela très fatigant. J’avais chaque après-midi une légère fièvre et, la nuit, je transpirais souvent sans pouvoir dormir. Quelques frères me conseillèrent de me reposer davantage, mais je répondis: "Je crains que je puisse me reposer à un point tel que j’en devienne rouillé." Je sentais que, malgré le peu de temps qu’il me restait à vivre, je devais croire que Dieu augmenterait mes forces et que je devais travailler pour lui. Je demandai alors au Seigneur quel travail il me demandait de terminer. S’il désirait que je fasse quelque chose, je lui demanderais alors d’épargner ma vie; autrement il n’y avait rien sur la terre que je puisse encore désirer.
J’avais été, auparavant, en mesure de me lever, mais, à présent, je ne le pouvais plus. Quelqu’un me demanda de conduire une réunion d’évangélisation, et je me forçai à me lever, demandant au Seigneur de me fortifier. Tandis que je me rendais à la réunion, je devais me cramponner ici et là aux réverbères pour me reposer. Chaque fois que je le faisais, je disais au Seigneur: "Cela vaut la peine de mourir pour toi." Certains frères qui le savaient me firent des reproches parce que je ne ménageais pas ma santé, et à cela je répondis que j’aimais mon Seigneur et que je donnerais ma vie pour lui. Après avoir prié pendant plus d’un mois, je sentis que je devais écrire un livre sur ce que Dieu m’avait appris. Jusque-là, j’avais pensé qu’il ne convenait pas d’écrire un livre avant d’être âgé mais, étant donné que j’allais bientôt quitter ce monde, le temps me sembla venu de me mettre à écrire, dans mes derniers jours. Je louai donc une petite pièce à Wusih, dans la province de Kiang-su, dans laquelle je m’enfermai et écrivis à longueur de journée. A cette époque, l’état de ma maladie s’aggravait à tel point que je ne pouvais même plus m’allonger. Pendant que j’écrivais, j’étais assis sur une chaise munie d’un haut dossier et, pour alléger mes douleurs de poitrine, je pressais celle-ci contre le bureau. Satan se mit à me parler: "Tu vas bientôt mourir, alors pourquoi ne pas mourir confortablement plutôt que dans les douleurs?" Je répliquai: "Le Seigneur me veut comme je suis. Va-t’en!" En quatre mois, j’achevai trois parties de L’homme spirituel. Pendant que j’écrivais, il y avait beaucoup de sang et de sueur, et beaucoup de larmes. Chaque fois que je finissais d’écrire, je me disais: "C’est mon dernier témoignage pour l’Eglise." J’écrivais au milieu de toutes sortes de difficultés et d’épreuves, mais je sentais que Dieu était exceptionnellement proche de moi. Les gens pensaient que Dieu me maltraitait; Frère Chen, par exemple, m’écrivit pour me dire: "Tu te dépenses à l’extrême; un jour, tu le regretteras." Je répondis: "J’aime mon Seigneur, et je dois vivre pour lui."
Pour que L'homme spirituel puisse être publié, il nous fallait environ quatre mille dollars. Etant sans ressources, je priai Dieu de pourvoir à ce besoin. Quatre collaborateurs seulement étaient au courant de cette situation, personne d’autre. Peu de temps après, le Seigneur nous avait fourni quatre mille dollars, et nous signâmes un contrat avec un imprimeur pour commencer à imprimer le livre. Il fut convenu que si nous ne pouvions faire face aux paiements suivants, non seulement nous perdrions la somme versée au comptant, soit quatre mille dollars, mais que nous devrions en outre payer une certaine somme pour défaut de paiement. C’est pourquoi, d’un commun accord, nous priâmes sérieusement à ce sujet. Lorsque l’imprimeur venait toucher son dû, le Seigneur nous fournissait toujours les moyens de le payer en temps voulu. Voyant que nous étions en mesure de tenir loyalement nos engagements, l’imprimeur disait: "Personne n’exécute ses paiements aussi ponctuellement que vous qui faites partie de l’Eglise."
Après que le livre eut été publié, je priai devant Dieu: "Maintenant, laisse ton serviteur partir en paix." A cette époque, ma maladie empira; je ne pouvais pas dormir en paix; je me réveillais au milieu de la nuit, me retournant sans cesse de côté et d’autre dans mon lit. Je n’avais plus que la peau sur les os. Je transpirais la nuit, et ma voix devint rauque. Plusieurs sœurs me veillaient à tour de rôle; l’une d’elles, une ancienne infirmière, pleurait chaque fois qu’elle me voyait. Elle disait: "J’ai vu beaucoup de patients, mais je n’en ai jamais rencontré un dont la condition soit aussi pitoyable que la sienne. Je crains qu’il n’ait plus guère que trois ou quatre jours à vivre." Lorsque quelqu’un me rapporta cela, je dis: "Que vienne la fin! Je sais moi aussi que je vais mourir prochainement." Un frère envoya un télégramme aux Eglises de différentes localités, les avisant qu’il n’y avait plus d’espoir pour moi et qu’il n’était donc plus nécessaire de continuer à prier pour moi. Un jour, je demandai à Dieu: "Pourquoi me rappelles-tu si tôt?" Je confessai alors mes péchés à Dieu. En même temps, je lui dis que je n’avais pas de foi. Ce jour-là, je me consacrai au jeûne et à la prière depuis le matin jusqu’à trois heures de l’après-midi, disant à Dieu que je ne ferais rien d’autre que ce qu’il voudrait. Au même moment, des collaborateurs étaient ensemble en train de prier avec ferveur pour moi, dans la maison de Ruth Lee. Lorsque je demandai à Dieu de m’accorder la foi, il me donna cette parole, que je n’oublierai jamais. La première phrase était: "Le juste vivra par la foi" (Romains 1:17); la deuxième: "Car vous êtes fermes dans la foi" (2 Corinthiens 1:24); et la troisième: "Car nous marchons par la foi"(2 Corinthiens 5:7). Ces mots me remplirent de joie parce que la Bible dit: "Tout est possible à celui qui croit" (Marc 9:23). Alors je remerciai Dieu et le louai de ce qu’il m’ait donné sa Parole; je crus que Dieu m’avait guéri. Je fus mis à l’épreuve sur-le-champ, parce que la Bible dit: "Car vous êtes fermes dans la foi" (2 Corinthiens 1:24); pourtant, j’étais toujours couché. A ce moment-là, un conflit s’éleva en moi: devais-je me lever et me tenir debout ou bien rester allongé? Après tout, l’homme s’aime lui-même considérant qu’il est plus confortable de mourir dans un lit que de mourir debout. La Parole de Dieu manifesta sa puissance, et ignorant tout le reste, je mis des vêtements que je n’avais plus portés depuis cent soixante-seize jours. J’étais prêt à quitter mon lit et à me tenir debout, lorsque je commençai à transpirer abondamment comme si j’avais été trempé par la pluie.
Satan me parla à nouveau: "Pourquoi essaies-tu de te tenir debout, alors que tu ne peux même pas t’asseoir?" Je lui dis: "Dieu me dit de me tenir debout", et je me levai. A nouveau baigné d’une sueur froide, je faillis tomber. Je ne cessais de répéter: "Etre ferme par la foi." Je dus alors marcher pour atteindre mon pantalon et mes chaussettes. Après les avoir mis, je m’assis. A peine m’étais-je assis que la Parole de Dieu me revint, disant que je devais non seulement tenir ferme par la foi, mais encore marcher par elle. J’étais conscient de ce qu’être capable de me lever et de marcher quelques pas pour aller chercher mon pantalon et mes chaussettes était une chose merveilleuse en soi. Comment pouvais-je espérer marcher à nouveau? Je demandai à Dieu: "Où veux-tu que j’aille?" Dieu répondit: "Va à la maison de Sœur Lee, n° 215." C’est là qu’un certain nombre de frères et sœurs avaient jeûné et prié au sujet de ma maladie pendant deux ou trois jours. Je pensai qu’il était peut-être possible de marcher un peu à l’intérieur d’une pièce; mais comment pouvais-je descendre les escaliers? Je priai Dieu: "O Dieu, je peux tenir ferme par la foi et, par la foi, je serai aussi capable de descendre les escaliers!" J’allai immédiatement à la porte qui menait à l’escalier et l’ouvris. Franchement, je peux vous dire que lorsque je me trouvai en haut de l’escalier il me sembla que c’était le plus grand escalier que j’aie jamais vu de ma vie. Je dis à Dieu: "Puisque tu m’as dit de marcher, je le ferai, même si je dois en mourir. Seigneur je ne peux pas marcher; je t’en prie, soutiens-moi dans ma marche, avec ta main. "Me tenant à la rampe, je descendis marche par marche, à nouveau baigné d’une sueur froide. Tandis que je descendais, je disais à haute voix: "marcher par la foi"; et à chaque pas je priais: "O Seigneur, c’est toi qui me permets de marcher." Tandis que je descendais les vingt-cinq marches, il me semblait que je marchais main dans la main avec le Seigneur dans la foi. En atteignant le bas de l’escalier, je me sentis fort et me dirigeai rapidement vers la porte de derrière. Ouvrant la porte, je marchai directement en direction de la maison de Sœur Lee. Je dis alors au Seigneur: "A partir de maintenant, je vivrai par la foi et ne serai pas contraint plus longtemps à garder le lit." Je frappai à la porte comme le fit Pierre (sans Rhode pour ouvrir la porte, voir Actes 12:12-17) et, lorsque j’entrai, sept ou huit frères et sœurs me contemplèrent, interdits, pétrifiés. Puis chacun resta calmement assis, pendant une heure, comme si Dieu était apparu parmi les hommes. J’étais assis là, moi aussi, rempli de remerciements et de louanges. Je racontai alors tout ce qui s’était passé au cours de ma guérison. Exultants et revigorés en esprit, nous louâmes tous à voix haute l’œuvre merveilleuse de Dieu. Ce jour-là, nous prîmes une voiture pour aller à Kiangwan, en banlieue, pour rendre visite à Sœur Dora Yu, une évangéliste célèbre. Elle eut un choc en me voyant, car elle avait reçu récemment des nouvelles annonçant ma mort imminente; aussi, lorsque j’apparus, me regarda-t-elle comme si j’étais ressuscité des morts. Ce fut dans l’allégresse une nouvelle occasion d’action de grâces et de louange à Dieu. Le dimanche suivant, je parlai pendant trois heures sur l’estrade.
Il y a environ quatre ans (vers 1932), je lus dans un journal une annonce de vente aux enchères d’un immeuble, de meubles et de divers effets ayant appartenu au fameux docteur allemand qui m’avait fait les radiographies, et qui était à présent décédé. Je levai les mains pour louer le Seigneur en disant: "Malheureusement, ce docteur s’en est allé, mais grâce te soit rendue, Seigneur, de ce que tu m’aies gardé en vie jusqu’à maintenant!" Couvert par son sang, je dis: "Ce docteur qui était plus fort que moi est décédé, mais j’ai été guéri par toi, Seigneur, et je suis toujours en vie!" Ce jour-là, j’achetai bon nombre de choses, en souvenir.
Direction pour l’œuvre
Entre le moment où je fus cloué au lit par la maladie et le moment où je fus guéri par Dieu, je vis plus clairement l’œuvre que Dieu voulait que je fasse. Celle-ci comprend les quatre aspects suivants:
1. Travail de littérature
Avant ma maladie, outre les visites que je faisais en différentes localités pour y conduire des réunions exceptionnelles, j’avais aussi la grande ambition d’écrire un bon commentaire détaillé et complet de la Bible. J’avais l’intention de consacrer beaucoup d’énergie, beaucoup de temps et beaucoup d’argent à écrire un ouvrage qui comprendrait environ cent volumes. Après avoir terminé L'homme spirituel, qui avait été commencé alors que je tombais malade à Nankin, je réalisai que cette tâche d’expliquer l’Ecriture n’était pas pour moi. Depuis lors, toutefois, j’ai souvent été tenté dans ce domaine. Après ma maladie, Dieu me fit savoir que l’objectif principal des messages qu’il me communiquait n’était pas d’expliquer l’Ecriture, ni de prêcher l’Evangile ordinaire, ni de prophétiser, mais de mettre l’accent sur la manière vivante de vivre. Je sentis alors que je devais reprendre la publication de la revue Le Présent Témoignage, afin d’aider les enfants de Dieu dans leur vie et leur lutte spirituelles. A chaque âge correspond une vérité particulière qui lui est spécialement nécessaire. Pour nous qui vivons dans les derniers jours, il doit aussi y avoir une vérité dont nous avons particulièrement besoin. Au moyen de la revue Le Présent Témoignage, le témoignage pour la vérité de l’âge présent était né. Je suis profondément convaincu que le temps présent est la période préparatoire. Les enfants de Dieu seront moissonnés, mais il faut d’abord qu’ils mûrissent (Marc 4:29). Le temps où nous devons être moissonnés est arrivé; la question de savoir si l’Eglise est prête ou non est d’une importance vitale. Le dessein de Dieu aujourd’hui est de hâter l’édification du Corps de son Fils, qui est l’Eglise. Comme il est dit dans l’Ecriture: "Afin de la sanctifier en la purifiant et en la lavant par l’eau de la parole, pour faire paraître devant lui cette Eglise glorieuse, sans tache, ni ride, ni rien de semblable, mais sainte et irréprochable" (Ephésiens 5:26-27) de sorte que l’ennemi puisse être détruit rapidement et que le royaume soit établi. J’espère humblement pouvoir, dans la main du Seigneur, prendre une petite part à cette œuvre glorieuse. Tout ce que j’ai écrit n’a qu’un but: que le lecteur, dans la nouvelle création, se donne entièrement à Dieu et devienne une personne utile entre ses mains. A présent, c’est de tout cœur que je remets à Dieu mes écrits, mes lecteurs et moi-même, car Dieu protège les hommes pour toujours; j’espère que son Esprit me guidera dans toutes ses vérités.
2. Réunions pour les vainqueurs
Dieu ouvrit mes yeux sur la nécessité de susciter, dans les Eglises de différentes localités, un certain nombre de personnes victorieuses, pour qu’elles deviennent ses témoins. Dans les chapitres 2 et 3 de l’Apocalypse, le Seigneur lance un appel à vaincre. C’est pourquoi, chaque année il y avait une réunion à l’intention des vainqueurs, au cours de laquelle je rapportais fidèlement les messages que Dieu m’avait révélés.
3. Edification d’Eglises locales
En m’appelant à son service, le Seigneur ne projetait aucunement de me voir organiser des réunions de réveil pour que les gens entendent davantage de doctrines ayant trait à l’Ecriture; il ne voulait pas non plus que je devienne un grand évangéliste. Le Seigneur me révéla qu’il voulait édifier des Eglises locales dans d’autres localités, pour se manifester lui-même, pour rendre témoignage de l’unité sur le terrain des Eglises locales, de sorte que chaque saint puisse accomplir sa tâche au sein de l’Eglise et vivre la vie de l’Eglise. Dieu ne veut pas simplement que l’on poursuive individuellement la victoire ou la spiritualité. Il désire obtenir une Eglise corporative et glorieuse qui puisse paraître devant lui.
4. Entraînement pour les jeunes
Si le retour du Seigneur est retardé, il sera nécessaire de susciter un certain nombre de jeunes qui perpétuent le témoignage et œuvrent pour la génération suivante. De nombreux collaborateurs ont déjà prié à ce sujet, dans l’espoir de trouver un endroit approprié à l’entraînement des jeunes. Mon idée n’est pas d’établir un séminaire ou un institut d’étude de la Bible, mais que les jeunes gens vivent une vie corporative et pratiquent la vie spirituelle, c’est-à-dire qu’ils reçoivent un entraînement en vue de l’édification, qu’ils apprennent à lire l’Ecriture et à prier afin de se forger un bon caractère et, du côté négatif, qu’ils apprennent comment se comporter à l’égard du péché, du monde, de la chair, de la vie naturelle, et ainsi de suite. Au moment opportun, ils retourneront dans leurs Eglises respectives pour être mêlés aux autres saints en vue de servir le Seigneur dans l’Eglise. J’ai acheté quelque dix ares de terrain à Chenju, dans la banlieue de Shanghai. Les plans de construction sont en cours et bientôt les jeunes pourront s’y rendre pour y être entraînés.
A l’avenir, mon fardeau et ma tâche comprendront généralement ces quatre aspects. Que toute la gloire soit rendue au Seigneur. Nous n’avons absolument rien en nous-mêmes et, quoique nous ayons accompli quelque chose, nous reconnaissons que nous sommes des serviteurs inutiles.
(1) Note de l’éditeur: En 1949, quatre à cinq cents églises locales avaient vu le jour, et ce, dans presque toutes les grandes villes.